Le marché était bondé de monde. Des odeurs entremêlées de pain en pleine cuisson et de relents puants de viande déchiquetée enivraient les allées de brocante, masquant le délicat fumet agréable du tissu parfumé vendu dans quelques étales. Si on s’approchait de trop près d’une vieille échoppe, on pouvait avoir la laudative surprise de s’adoucir l’odorat auprès de plantes odorantes et autres remèdes de guérisseur. Le marché de Camelot était décidément l’un des lieux de commerce les plus vivants du pays. Je ne me lassais pas de vagabonder discrètement au milieu de cette foule, en plein coeur de la cité de Camelot. Il me semblait logique d’appréhender son objectif en apprenant à le connaître. Quoi de mieux que de visiter la ville en toute impunité. Je n’en abusais néanmoins pas, évitant de rôder près du château et de venir trop régulièrement. Mon propre domicile me suffisait, et mes esclaves ne me posaient aucun problème ne faisant que me servir pour mon plus grand plaisir. Grâce à mes puissants pouvoirs, j’arrivais à masquer mon énergie et à me fondre aisément dans une foule toujours plus dense. J’avais privilégié un accoutrement sobre et discret: une simple tunique noire à capuchon portée par-dessus d’autres vêtements simples. J’évitais malgré tout le contact avec les lépreux et autres pauvres en guenilles, bien trop sales pour moi. Mais j’avais une attirance pour la place marchande, notamment parce qu’elle recelait toujours de mystérieux trésors dont les vendeurs ignoraient tout. Lors de l’une de mes précédentes virées, une vieille femme m’avait vendu un miroir trouvé dans une charrette abandonnée au bord de la route. Elle ne s’était pas doutée un seul instant qu’ils s’agissait d’un miroir de communication, permettant ainsi de discuter et de visualiser avec un peu de magie ce qui se trouvait de l’autre côté du second miroir relié à celui-ci. Ainsi, j’aimais faire quelques rares acquisitions. En effet, la foule n’était pas ma tasse de thé ; je n’avais donc aucun intérêt à vagabonder au milieu d’une horde de gens du peuple pour mon bon plaisir. Cela faisait quelques semaines que je n’étais pas revenu ici. De nouveaux articles dégotés par des marchands à travers le pays devaient donc se trouver en vente ici, et j’avais à coeur de dégoter de nouvelles reliques pour agrandir ma collection déjà soutenue.
Mais cette fois-ci, mon chemin allait être différent. En effet, mon regard perçant avait croisé celui d’un vieil homme qui se tenait droit comme un roc au milieu de la ruelle passante. Malgré mes pouvoirs, je me savais repéré. Et j’avais moi-même reconnu la personne qui se dressait fièrement en m’observant: Merlin l’enchanteur. Le fidèle conseiller du roi Arthur dont on dit qu’il serait l’un des magiciens les plus puissants de l’histoire. Cela m’arrachait toujours un rictus tant je me savais puissant. Je n’aurais aucun mal à rivaliser avec un vieux sénile tel que lui. Mais si j’arrivais à reconnaître cet homme tant il était connu, lui ne savait sans doute pas qui j’étais. Constatant de son visage dur et sévère braqué sur moi, je me doutais qu’il avait décelé en moi des capacités magiques puissantes. Mon nom commençait à raisonner dans diverses contrées, mais mon identité précise, mon visage, mon corps, eux restaient inconnus. Et c’était tout à fait logique: je veillais à ne jamais laisser de traces. Être méticuleux et précis m’était essentiel pour aboutir à la réussite de mon objectif. Néanmoins, il aurait été immature et puérile de déclencher une esclandre dans un endroit contenant autant de personnes. De surcroît, je me demandais s’il s’agissait d’un réel hasard que de croiser cet homme ici, ou s’il était déjà sur mes traces, bien que cela soit étonnant. Enfin, j’avais peut-être là une occasion à saisir. Être aussi proche de Merlin en plein de coeur de Camelot, quelle situation cocace… Si le roi Arthur savait que certains de ses ennemis se baladaient impunément ici avec l’aisance qu’était la mienne, son visage virerait avec certitude au rouge cramoisi. Ainsi, j’adressais un hochement de tête en direction de Merlin tandis que je m’approchais d’une petite cabane au bord de la ruelle. J’y pénétrais. Il s’agissait d’une vaste pièce arquée autour d’une cheminée qui crépitait malgré que le soleil soit au zénith. Un repas semblait se préparer si on tenait compte du chaudron rempli d’un ragoût qui cuisait au-dessus du feu. Sur une table de bois, du pain tranché et des assiettes en terre cuite étaient disposées. Deux très exactement. Une voix féminine s’éleva dans les airs.
« Chéri, tu es déjà rentré de la forge ? »
J’enlevais le capuchon qui couvrait mon visage, et une jeune femme apparut alors. D’une trentaine d’années, elle était vêtue d’une robe mal cousue grise et d’un tablier blanc excessivement sale. Ses cheveux étaient mal peignés et attachés dans un espèce de chignon presque défait. Elle fit tomber sur le sol les verres qu’elle tenait dans les mains en constatant ma présence.
« Qui… Qui êtes-vous ? - Je ne suis personne. Je vais m’entretenir quelques minutes avec Merlin l’enchanteur ici-même. Déguerpissez et ne revenez que lorsque cela sera terminé. »
Prenant peur à l’entente de ces mots et au son de ma voix grave tintée de froideur, la jeune femme s’exécuta, quittant les lieux par une porte dérobée. J'étais satisfait de ne pas avoir à utiliser ma magie pour faire fuir une pauvre paysanne comme elle. Mais je savais utiliser les mots à bon escient, et ma présence charismatique et inquiétante suffisait à être convaincant. Quant à moi, j’attendis patiemment que l’enchanteur ouvre la porte et me rejoigne dans cette chaumière désormais libre. J’avais un plan simple et peu abouti en tête qui avait toutes les chances de marcher. J’allais convaincre le magicien de mes bonnes intentions envers la couronne et son roi, et lui proposer mes services. Et si tout ne se passait pas comme prévu… J’avais toujours voulu me mesurer à lui, alors c’était peut-être l’occasion.
#Sujet: Re: Fausse alliance ou nouvel ennemi - Merlin & MarinJeu 12 Nov - 12:25
Fausse alliance ou nouvel ennemi
But I must explain to you how all this mistaken idea of denouncing pleasure and praising pain was born and I will give you a complete account of the system, and expound the actual teachings of the great explorer of the truth, the master-builder of human happiness. No one rejects, dislikes, or avoids pleasure itself, because it is pleasure, but because those who do not know how to pursue pleasure rationally encounter consequences that are extremely painful.
Merlin était un homme très occupé, c’est vrai. Il avait toujours une besogne à effectuer. Que ce soit pour le compte d’Arthur, du Royaume, ou alors pour sa propre personne. Merlin ne chômait pas, pourtant, il n’avait pas non plus l’impression d’être débordé. Il avait toujours un peu de temps pour lui, pour se reposer, pour se détendre. C’était là des constantes importantes, qu’il serait idiot de négliger. De toute manière, Merlin n’avait plus rien à prouver. Tout le monde avait été témoin de sa puissance, de près ou de lui. Il n’avait pas volé sa réputation. Il était un homme d’une grande puissance, mais cela ne voulait pas dire qu’il avait tous les pouvoirs. Il gardait des faiblesses, comme tout un chacun. Si la plus flagrante était Viviane, il n’y avait pas que cela. Quoiqu’il en soit, il ne prenait jamais vraiment la peine d’assurer ses arrières, parce qu’il avait l’impression de maîtriser suffisamment la situation pour garder ses ennemis, et ceux de la cour assez loin. Merlin voulait surtout protéger Arthur et laisser son règne aussi prospère qu’il l’était présentement. Certains n’étaient pas d’accord avec cela, et les ennemis d’Arthur étaient nombreux, même s’ils n’étaient pas tous connus du magicien. Il tentait d’ouvrir l’œil, et à son grand désarroi, il trouvait Arthur bien trop naïf. Il accordait trop facilement sa confiance, et voulais beaucoup trop être l’ami de tout le monde. Mais bon, c’était dans le caractère du souverain, et il ne pouvait pas le changer. La bonté d’Arthur contrastait avec la sévérité de son père. Ce n’était pas si mal, après tout, Arthur était apprécié de son peuple, mais il risquait également d’être une proie trop facile pour ses ennemis, et Merlin ne pouvait pas sans cesse être derrière lui à le surveiller, et le protéger, même s’il tentait toujours de faire son maximum, bien évidemment.
Quoiqu’il en soit, il tentait le plus possible de laisser au souverain faire ses épreuves, ne l’épaulant que quand ce dernier le demandait. Arthur venait souvent chercher ses conseils, et Merlin trouvait que c’était une bonne chose, ainsi, il n’avait pas l’impression que l’enchanteur était trop intrusif dans sa vie. En même temps, si Merlin n’avait pas été là, Arthur ne serait jamais venu au monde. Et Merlin n’avait pas de scrupules pour ce qui était arrivé à la famille de sa mère. Certains sacrifices étaient nécessaires pour le bien du monde. Mais tout le monde ne l’entendait pas de cette oreille, malheureusement.
Pour une fois, Merlin avait envie de se promener un peu, plutôt que de penser à tous les problèmes qui pesaient sur les épaules d’Arthur. Pour cela, il décida de se rendre au marché, au moins, il aurait l’occasion de se changer les idées. Il n’avait pas l’intention de s’acheter quoique ce soit, mais rien que de se promener parmi les étales étaient agréable. Il n’appréciait pas nécessairement l’agitation, et préférait le calme mais il n’était pas désagréable de changer ses habitudes. Il fut cependant surpris de ressentir une autre présence magique. Il y avait de plus en plus de sorciers dans la région, et cela n’était pas une bonne chose à son sens. On n’était jamais certains de ce qu’ils voulaient, et de ce dont ils étaient capables.
Il repéra le jeune homme en question et se contenta de l’observer durant un moment sans rien dire. Captant son signal, il suivit le jeune homme sa précipitation, cherchant à savoir qui il était, et ce qu’il voulait.
“Cela ne se fait pas de chasser des honnêtes gens de leur domicile sans raison valable.”
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